Prolongation de la transition malienne de 5 ans : la Cedeao dispose- t-elle encore d’une marge de manœuvre ?

Prolongation de la transition malienne de 5 ans : la Cedeao dispose- t-elle encore d’une marge de manœuvre ?

La principale proposition sortie des assises nationales de la refondation est la prolongation de la transition malienne de cinq ans. Une décision qui prend le contrepied de la volonté de la Cedeao et des autres partenaires du Mali, attachés à l’échéance de février 2022.

La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), se réunira en session extraordinaire le dimanche 9 janvier 2022. Le sujet du jour, la proposition de prolongation de la transition malienne de cinq ans. En effet les autorités maliennes ont choisi la durée maximale proposée par les participants aux assises nationales. Un nouvel épisode dans le bras de fer entre les autorités maliennes de transition et la Cedeao, à l’issue incertaine.

Les autorités maliennes ont le vent en poupe

Les sanctions et menaces de sanctions supplémentaires de la Cedeao, n’ont pas eu raison des velléités de prolongation de la transition malienne. En effet, l’impératif des assises nationales, soulevé par les autorités de transition, trouve tout son sens dans les propositions qui en ont découlées. La principale qui est de prolonger la transition de cinq ans, a été soumise par les autorités.

Mercenaires de Wagner : « ce choix des autorités maliennes (..) d’un côté, on peut le comprendre en réalité », Jean Hervé Jezequel

Ce qui peut être considéré par la Cedeao, comme un affront de la part de Assimi Goïta et son équipe, révèle qui a la faveur des pronostics. Selon Niagalé Bagayoko, chercheuse au Réseau africain pour le secteur de la sécurité, le régime malien fait preuve d’« une grande habileté d’un point de vue diplomatique sur la scène internationale ».

En outre il démontre une « capacité à répondre à certaines des aspirations populaires qui ont provoqué les manifestations massives qui ont conduit à la destitution du président IBK ». Notamment la lutte contre la corruption, la diversification des partenariats internationaux. Ce qui confère au régime, selon la chercheuse s’exprimant sur Rfi, une base populaire.

De plus, les autorités maliennes ont remporté une victoire diplomatique en franchissant toutes les lignes rouges fixées par la France depuis le coup d’Etat. La dernière en date est de réussir à faire venir les russes sur le sol malien, sans que les français ne mettent en exécution leur menace de quitter définitivement le territoire.

La Cedeao face à ses responsabilités

La tâche s’annonce difficile pour la Cedeao, selon Niagalé Bagayoko. En effet, dit-elle, il n’est pas souvent fait cas du « rejet de plus en plus massif dont fait l’objet la Cedeao » dans la sous-région, autant que le sentiment anti-français. Ce, « en raison des contradictions entre son mandat et les objectifs qu’elle s’est fixée et les décisions prises ».

Nana Akufo Addo, président en exercice de la Cedeao

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Contrairement à sa résolution de passer d’une Cedeao des Etats à une Cedeao des peuples, ses décisions « contribuent à asseoir si ce n’est des coups d’Etats, en tout cas des manipulations ou des changements constitutionnels ». Contraires « au protocole de 2001 sur la démocratie et la bonne gouvernance ».

L’organisation est donc confrontée au dilemme de maintenir son autorité en prenant des sanctions efficaces contre l’Etat malien « sans se mettre à dos les populations maliennes ou plus largement de la sous-région ».

Prolongation de la transition malienne, la Cedeao au pied du mur

Dans ce jeu de dupes, l’ultime alternative de la Cedeao consiste en des sanctions. Mais la dernière salve de sanctions envers une centaine d’autorités maliennes, n’a pas empêché ces derniers, de prendre des décisions contradictoires aux demandes de la Cedeao. Pour être vraiment contraignantes l’organisation devrait prendre des sanctions plus larges, touchant la population.

Mais « le rôle de la colère et de l’exaspération populaire » dans « la gestion de la crise malienne et plus largement de la crise sahélienne », n’est pas à négliger selon Mme Bagayoko. Ce qui réduit la marge de manœuvre de l’organisation sous-régionale. De telles sanctions ne seront pas alors, suivies de l’effet recherché, même s’il est préférable qu’elles soient prises.

En outre, il existe une division au sein de la Cedeao, entre un camp inflexible (minoritaire) et un camp flexible (majoritaire) quant à la tenue d’une ligne dure. Division accentuée par « le type d’accession au pouvoir des différents présidents actuellement en place ». Pour la chercheuse, : « on s’achemine vers des régimes d’avantages autoritaires sans doute beaucoup moins respectueuses d’un certain nombre de principes démocratiques » dans la région. Mais elles devront aussi faire face à la longue, à l’exaspération des populations.

Esso A.